Afrique - Août 2025
18 / 08 / 2025
Chers amis,
Revenons à mon premier jour en Afrique du Sud, le jeudi 14 août.
Après le vol éprouvant de Lagos à Johannesburg, l’abbé Kemna est venu me chercher à l'aéroport. Mon vol a atterri à 5 heures du matin. La conduite à gauche, comme vous vous en souvenez. Nous sommes arrivés à la maison que l’abbé avait louée pour le week-end. Nous sommes allés nous coucher. Le lendemain, après la messe de l’abbé, le restaurant de sushis, les courses, la messe et les confirmations à 19 heures. Quelques fidèles très dévoués qui espèrent une croissance en Afrique du Sud...
Le lendemain, vendredi 15 août, l’abbé a célébré sa messe le matin. Nous sommes ensuite allés déjeuner avec un médecin et sa femme. Des personnes âgées, très sympathiques. Nous avons mangé et discuté un bon moment, puis nous sommes rentrés à la maison. J'ai célébré la messe de l'Assomption à 17 heures. Personne n’était présent. Trop tôt pour les ouvriers… Après la messe, nous sommes allés chez un fidèle. J'ai donné une conférence, expliquant mon histoire et mon point de vue sur la situation de l'Église. Il y avait quelques gens du Novus Ordo, qui semblaient venus uniquement pour s'opposer à mes propos. Parmi eux, une ancienne catéchiste du Novus Ordo. Elle ne tarissait pas d'éloges sur la grandeur de François. Au cours de la discussion, elle m'a demandé : « Croyez-vous que je sois catholique ? » J'ai répondu : « D’après ce que vous dites, je n'en suis vraiment pas sûr. » Plus tard, elle a poursuivi en disant que, dans les Saintes Écritures, seuls les Évangiles sont la Parole de Dieu. Le reste relèverait de l'opinion de saint Paul. Par exemple, le fait qu'une femme doive être soumise à son mari, ce serait l'avis de saint Paul. Je l'ai regardée et lui ai dit : « Maintenant, je sais que vous n'êtes pas catholique. » Elle était un peu choquée et a dû admettre son erreur. Tout s'est bien terminé autour de quelques sandwichs, mais l’abbé a encore du travail à faire avec ces gens. Nous sommes rentrés à la maison pour y passer la nuit. Une rencontre agréable dans l'ensemble, avec beaucoup de gens sympathiques.
Le lendemain, samedi 16, nous sommes allés à l'aéroport tôt. Nous devions y être à 6h. Une fois sur place, nous avons appris que notre billet était pour un avion qui partait de Cape Town vers Durban, et non de Johannesburg vers Durban comme prévu. Il a fallu un certain temps pour changer notre billet et nous avons dû prendre le vol de 7h30. Cela nous a laissé le temps de prendre un bon café et un bon déjeuner. Les prix en Afrique du Sud ne sont pas ceux des États-Unis. Tout est beaucoup moins cher ici. Nous avons ensuite pris l'avion pour Durban. Un court vol de 50 minutes. Nous avons loué une voiture et sommes partis pour une autre maison que l’abbé avait louée pour les cérémonies. Le trajet était très beau et j’étais ravi de voir pour la première fois l'Océan Indien. Très beau. Majestueux, vraiment. Nous sommes arrivés à la maison et avons tout préparé pour la messe. Il y a eu quelques confessions générales de nouveaux convertis. Ensuite, les compléments de baptême, la confirmation, la messe. Trois confirmations de jeunes adultes; une dizaine de personnes étaient présentes. C'était très touchant de voir ces trois nouveaux convertis dans la vingtaine recevoir avec une grande dévotion le sacrement de la Confirmation. Après la messe, nous sommes allés au restaurant Ocean Basket avec les fidèles. C'était un endroit agréable, avec une bonne cuisine, mais un peu proche du Casino et assez bruyant. Le soir, après le repas, nous sommes allés à la plage, pour toucher de nos mains ou plutôt de nos pieds l'Océan Indien. J'ai été surpris par une vague, et mes chaussures étaient complètement mouillées, ce qui m'a un peu gêné pendant les 24 heures qui ont suivi. Elles sont sèches maintenant. Nous sommes rentrés à la maison pour y passer la nuit.
Le lendemain, le dimanche 17 août, fut certainement le jour le plus intéressant. Après la messe du matin à Durban, nous sommes allés à la mission zouloue. L'endroit s'appelle Izingolweni. C'est à environ deux heures et demie au sud de Durban. Nous avons eu un petit incident sur la route : nous n'avions pas de rands (monnaie sud-africaine) pour payer le péage. Nous avions nos cartes de crédit, mais ils n'acceptaient pas les cartes internationales. Nous avions des dollars américains et canadiens, mais ils n'acceptaient pas ce genre de monnaie. Finalement, l'homme derrière nous a eu la gentillesse de payer le péage. Il y a encore de bonnes âmes sur terre.
Nous sommes arrivés à la Mission zouloue. La route pour y arriver n'était pas aussi mauvaise que je le pensais. La majeure partie est une autoroute, suivie de quelques kilomètres sur un chemin de terre. Dès notre arrivée, tout est devenu incroyable. Un autre monde. Cette mission est une ancienne mission de S.E. Mgr Bedingfeld, consacré par S.E. Mgr McKenna. Mgr Bedingfeld a fait un travail remarquable d'évangélisation des Zoulous. C'est vraiment une petite chrétienté, centrée autour d'une petite église de village. Le plus beau des endroits. Malheureusement, ils se sont liés à un moment donné avec les Disciples de l'Amour Infini, une secte du Canada. Mais il semble que Mgr Bedingfeld ait répudié cette association à la fin de sa vie. Quoi qu'il en soit, tous ont maintenant rejeté ce lien et ont fait leur profession de foi. De plus, le clergé du lieu a accepté de transmettre à l’abbé Kemna l'intégralité de l'apostolat dans cette église.
Mgr Bedingfeld est décédé en 2021, des suites de la Covid-19 ou du protocole Covid qu’ils lui ont administré à l'hôpital.
Les enfants ont commencé à venir vers nous. Ils voulaient baiser l'anneau de l'évêque. J'ai dû apprendre mes premiers mots en zoulou : « Sawubona », qui signifie « Bonjour ». Mais la vraie salutation catholique est : «Magantoneswe o Jesu Christo », qui signifie : « Les bénédictions de Jésus-Christ ». Et la réponse est : « Kuze kube phagade », qui signifie « Avec vous pour toujours ».
Nous avons ensuite rencontré le père Michael, un prêtre âgé ordonné par Mgr Bedingfeld. Je pense que Mgr Bedingfeld savait qu'il allait bientôt mourir et qu'il n'y aurait personne pour le remplacer. Il a dû choisir le meilleur homme possible et l'ordonner. Je n'en suis pas sûr. La situation n'est pas parfaite : le père Michael n'utilise pas le latin. Il célébrait la messe en zoulou. Là encore, une situation qui est en train d'être corrigée par l’abbé Kemna qui s’occupe d'eux. A part ça, le père Michael est une âme merveilleuse. Il est très âgé, mais on voit combien il se soucie de ses fidèles. Il était rempli de joie de voir un évêque. Je suis sûr que cela lui rappelait son défunt évêque. Il ne cessait de nous dire combien il était heureux.
Nous avons aussi rencontré une autre âme merveilleuse : Sœur Redemptoris. Elle s'occupe de tout et, en plus, elle a recueilli 14 orphelins et s'occupe d'eux. Ils l'appellent « Maman ».
Nous sommes entrés dans la sacristie. Un endroit pauvre, certes, mais il suffirait de peu pour l’aménager un peu mieux. L'église dans son ensemble est un bel édifice. Elle est en fait très belle dans sa simplicité. Je ne sais pas si elle a été construite par Mgr Bedingfeld, mais cela ne m'étonnerait pas. Le nom de l'église est Saint-Adalbert, ou Saint-Adalbéro en zoulou. Il y a plusieurs saints Adalbert. Celui-ci est le martyr. Dès notre entrée dans la sacristie, j'ai entendu les magnifiques chants qu'ils chantaient en zoulou. Ils faisaient de la polyphonie en zoulou. Très beau, mais aussi très touchant. On aurait dit que nous étions au paradis ! Voir ces pauvres gens chanter les louanges de Dieu dans leur langue avec une telle ferveur m'a fait monter les larmes aux yeux.
Nous avons préparé la messe, puis nous sommes entrés en procession avec un joli tableau de saint Adalbert. L’abbé Kemna leur avait préparé cette surprise. Nous avons béni le tableau et l'avons accroché au mur. Le Père Michael était à nouveau rempli de joie. La cérémonie de confirmation a commencé. J'ai donné la confirmation à plus de 50 personnes, je crois. Je n'ai pas le nombre exact. De beaux noms encore : « Redempta » en est un dont je me souviens. Certains enfants faisaient de leur mieux pour ne pas rire à l'idée de recevoir une gifle. Les enfants sont des enfants…
La cérémonie a été suivie de la Sainte Messe. Ils ont chanté de magnifiques chants. Encore une fois, une polyphonie simple mais magnifique. Ce fut certainement l'une des messes les plus touchantes de ma vie.
Après la messe, nous avons pris quelques photos à l'extérieur, puis nous avons chanté quelques chants d'action de grâce. Un repas avec les fidèles a suivi. Ils étaient tous assis sur des bancs dans un grand carré. Ils ont servi un repas chaud très correct : poulet, riz, etc. Après le repas, beaucoup ont pris le chemin du retour. La plupart des gens n'ont pas de voiture au Zoulouland. Ils ont des maisons modernes, mais minuscules. Mais ils marchent, parfois pendant des heures, pour venir à la messe. Quelle édification ! Après le repas, Sœur Redemptoris est venue me voir et m'a offert la crosse de Mgr Bedingfeld. Rien d'extraordinaire en soi, mais je pense que le geste était immense pour elle. Elle m'a répété à plusieurs reprises : « Maintenant, nous avons retrouvé l'espoir! » Ce sera une excellente crosse de voyage.
Nous avons dit au revoir au Père Michael. Je voulais visiter le couvent des religieuses (il a trois religieuses) et aussi la maison de Mgr Bedingfeld. Nous sommes partis un peu tard et avons eu quelques péripéties sur la route, la sœur nous faisant faire de longs détours pour faire le plein d’essence. Il n'y a pas d'essence partout au Zoulouland… Nous voyagions avec Sœur Redemptoris et Matthew, un des orphelins. Évidemment, Matthew voyageait simplement avec sa mère adoptive… La nuit commençait à tomber quand nous sommes arrivés au couvent. C'était le crépuscule. La route était assez bonne, mais à la fin, pendant plusieurs kilomètres, c’était un chemin de terre et pas en bonne condition.
Nous avons fouillé une partie du matériel de la sacristie, car l’abbé avait besoin d'emprunter quelques vêtements sacerdotaux pour la Mission. Nous travaillions dans le noir, dans cette chapelle en tôle. De temps en temps, nous découvrions que des animaux avaient fait leur nid dans une boîte d’ornements sacerdotaux. Pas génial. L'abbé devra y retourner et mettre un peu d’ordre. La sœur m'a laissé partir avec le Pontificale de Mgr Bedingfeld, le livre utilisé pour les ordinations. Il est marqué au nom de Mgr McKenna. Probablement un cadeau de ce dernier à Mgr Bedingfeld. Il me sera plus utile qu'aux souris quelque part en Afrique du Sud.
Tout me donnait l'impression d'être si loin de chez moi… Il me semblait voir Mgr Bedingfeld la nuit, contemplant les étoiles, tandis que les insectes africains faisaient ce bruit constant, fort et beau, dans un lieu inconnu de tous, passant des décennies en silence et en prière. Quelles nuits a-t-il dû passer là-bas, loin de tout, sauf de quelques religieuses dans leur humble couvent ! Nous avons dit à la sœur que si on me séquestrait, les Canadiens ne me retrouveraient jamais ici. Je crois qu'elle était très tentée… La sœur nous a montré la chambre où l'évêque a passé sa dernière maladie. On pouvait voir qu’elle était très attachée à lui… La sœur s’est mise à genoux et a demandé la bénédiction. Priez pour elle, s’il vous plaît!
Nous sommes rentrés à la maison à Durban. À 9 heures, j'ai célébré la messe ce lundi 18 août. Nous sommes ensuite allés prendre un café chez une fidèle, au bord de l'Océan. Un endroit magnifique. Nous avons discuté de la crise de l'Eglise et de toutes les difficultés que cette personne a rencontrées avec sa paroisse locale de la FSSPX avant de finalement la quitter : refus d'aborder ouvertement la question des « papes » de Vatican II, de donner des réponses, etc. Le refrain habituel qu'on entend partout.
L’abbé Kemna m'a conduit à l'aéroport. J'avais un premier vol pour Johannesburg, j'ai attendu trois heures à l'aéroport, et me voilà dans l'avion pour Zurich, en train de terminer cette lettre quelque part au-dessus du Cameroun.
Mais avant de terminer, dans l'avion pour Johannesburg, j'étais à côté d'un homme de descendance portugaise. Il semblait vouloir discuter. Je l'ai laissé faire. La discussion est venue d’elle-même sur la situation des Blancs d’Afrique du Sud, ce qui m'a permis d'avoir une meilleure vue d’ensemble. Voici ce qu'il m'a dit : l'Afrique du Sud comptait autrefois 30 millions d'habitants. Le gouvernement a encouragé une immigration massive. De très nombreuses personnes sont venues du reste de l'Afrique, et le pays est devenu un pays de 60 millions d'habitants. Il a ajouté qu’alors que les autochtones ne posent généralement aucun problème, tous ces immigrants ont créé de nombreuses difficultés. Il a ajouté que le problème se situe au niveau du gouvernement. Il y a un programme très raciste à l'œuvre. Si le gouvernement ne tolérait pas, voire ne soutenait pas ce programme anti-Blancs, la situation ne serait pas si grave. Certains politiciens affirment ouvertement: « Tous les Blancs doivent être tués », et ces déclarations ne semblent poser aucun problème… Il a ajouté que le taux de criminalité est assez élevé. Il a expliqué que les Blancs quittaient le pays pour deux raisons : la criminalité (il faut être prudent, surtout si l’on habite la campagne et que l’on possède beaucoup de terres), mais aussi le chômage (les Blancs ont du mal à trouver du travail ; dans chaque formulaire de candidature, il faut indiquer sa couleur de peau… si ce n’est pas la bonne couleur, on n’obtiendra pratiquement aucun emploi, tout simplement). Une situation triste. Il a ajouté que oui, des fermiers blancs sont encore tués de temps à autre. Leurs terres sont confisquées par des étrangers qui les laissent en friche et le pays s’appauvrit de plus en plus. Il a ajouté qu’il y a moyen de vivre en Afrique du Sud et de se sentir en sécurité, mais qu’il faut en connaître les tenants et aboutissants et prendre les bonnes décisions. Il a ajouté qu’à part cela, l’Afrique du Sud est un paradis, et je le crois. De magnifiques paysages partout.
L'Afrique me manquera beaucoup. Le Nigéria et l'Afrique du Sud sont des endroits magnifiques, surtout le Zoulouland. Évidemment, venant du Canada, l'Afrique intéressante n'est pas l'Afrique industrielle, mais plutôt l'Afrique originelle : l'Afrique inchangée qui semble traverser les siècles sans renoncer à ses traditions millénaires. Longue vie à cette Afrique qui pose un obstacle au Nouvel Ordre Mondial.
J'ai hâte de vous revoir tous !
En attendant, que Dieu vous bénisse !
Mgr Roy